Erik Gunnarson et Francesca Wolfe enquêtent sur les reliques abandonnées des communautés spatiales des premières années de la colonisation.
Wolfe : « Les vaisseaux-mondes sont fondamentalement des villes mobiles conçues pour transporter des populations grandissantes, et sont toujours un spectacle impressionnant. Mais il y en a un qui me revient sans cesse : le Thetis, orbitant Nefertem 6 a.
Écouter ses journaux me glace toujours le sang. Ils décrivent comment une phrase murmurée provenant d’une planète inhabitée a poussé plus de 17 000 personnes à s’entretuer. Personne ne sait s’il s’agissait d’une hystérie collective, de stress psychologique après des années passées dans l’espace, ou… de quelque chose d’autre.
Après de nombreuses visites au Thetis, je ne peux toujours pas trouver le courage d’écouter sa dernière entrée de journal. On m’a prévenu que je ne serais plus jamais la même après. »
Gunnarson : « Avant les hyper-réacteurs, les vaisseaux-mondes étaient un moyen viable de coloniser les systèmes stellaires lointains. Des millions de gens ont vécu leur vie entière dans des sociétés autonomes, pour que leurs descendants puissent fouler le sol de nouveaux mondes.
La tragédie, c’est que beaucoup de ces méga-vaisseaux ont complètement disparu sans avoir jamais atteint leur destination. Mais certains sont redécouverts, habituellement à cause de postes d’écoute interceptant leurs vieilles transmissions.
Il y a diverses causes à l’échec de ces expéditions. Le Lazarus, orbitant désormais Virudnir 6, a souffert de pannes mécaniques, tandis que le Pleione, dans le système Hez Ur, a vu sa population produire uniquement des bébés de sexe masculin.
Les plus dérangeants sont ceux dont l’équipage est tombé dans la barbarie, comme celui de l’Artemis dans le système Mu Cassiopeia C 1, et le Demeter dans le système Mizuchi. Avec le préféré de Wolfe, si le mot est juste, ces cas se dressent en terribles monuments de notre nature la plus sombre.
Les vaisseaux-mondes perdus transportent rarement des survivants, mais c’était le cas pour le Golconda, dont les personnes habitent désormais un avant-poste sur Upaniklis B 3. Donc peut-être que d’autres reliques vivantes sont encore en train de dériver dans le vide, attendant d’accomplir des vieilles missions de plusieurs siècles. »